Annalia DEBAT

Bac Scientifique puis Ecole Supérieure du Parfum

Corpo35 permet de parler d’un projet réalisé (un parfum évalué par des parfumeurs professionnels, un concours soutenu par les entreprises de l’industrie, une création vendue en éditions limitée) et permet de valoriser une expérience de création de parfum.

Mon expérience personnelle durant et après le concours Corpo 35 Perfume Awards :

Pendant la durée du concours Corpo 35, j’allais tous les soirs au laboratoire de création de mon école pour pouvoir travailler sur le parfum que je présenterai aux jurys. Généralement seule au laboratoire, je me sentais libre et totalement prédisposée pour ce moment de création. Souvent en écoutant du piano, des compositeurs italiens, mes préférés : Ludovico Einaudi, Roberto Cacciapaglia et Roberto Jonata, je me lançais dans la conception de ce qui deviendrait Bélem. Le concours Corpo35 m’a permis de créer dans des conditions réelles de parfumeur (avec un brief, un objectif, des évaluateurs) et de comprendre ce qu’est réellement ce métier : tant ses joies que ses facettes les plus rudes. En effet, la création d’un parfum passe par beaucoup d’émotions : le stress, la déception, le découragement mais aussi la fierté, l’excitation, le partage. J’ai pris beaucoup de plaisir à composer pour ce concours, le thème m’a beaucoup inspirée. Le fait qu’il fallait faire un dossier marketing pour illustrer notre parfum, raconter son histoire vraiment intéressante et permettait de dévoiler toutes les facettes du parfum : éveiller l’imagination, faire ressentir des émotions, apporter une ambiance et un contexte à sa création. Après le concours, j’étais très heureuse d’avoir remporté la deuxième place du concours et j’étais vraiment impatiente de voir sortir mon parfum. Un parfum réalisé et commercialisé, je n’en revenais pas !

Confessions olfactives

Quelle a été votre inspiration pour créer «Inspiration Belem»?

 Mon inspiration a été d’imaginer l’histoire d’un marin, qui navigua sur les flots avec son équipage en 1890 à bord du Bélem, célèbre navire français. Je me suis donc inspirée de l’histoire du Béleme et ai écrit le journal de bord de ce marin. Les images du port de Nantes et de Bélem au Brésil et bien sur du navire m’ont également inspirée. Et bien sûr, la musique : Bélem est aussi inspiré de la chanson de Charles Aznavour « Emmenez-moi », qui retrace les voyages et le rêve de pays lointains. Voici le texte de présentation que j’avais écrit pour l’inspiration de mon parfum : Ce parfum parle de liberté, mais aussi de silences passés en mer, ou encore de l’agitation lors des nombreuses tempêtes. Il raconte la traversée d’un océan, le voyage vers de merveilleux pays. La découverte des épices, du maté et des fèves de cacao. Entre terre et mer, le côté santalé épicé et vétiver s’inspire de terres inexplorées et de pays lointains tandis que le côté algue, hespéridé, très frais rappelle la fraîcheur marine venant de l’Océan jusqu’au port de Nantes autrefois. Ce marin n’était pas comme les autres, il hissait les voiles et particulièrement celles du mât de misaine. Ce symbole de liberté le suivra dans toute son histoire. Un marin endurci par la vie, qui avance au rythme des vagues. Chaque matin il voit la brume couvrant l’océan de son doux manteau, il sent les embruns lui collant la peau. L’odeur du bois humide le rassure. Les voix de l’équipage qui accompagnent chaque voyage et bien sûr ce bijou qu’il garde contre sa poitrine en pensant à elle, qu’il reverra à son retour. Elle qui l’attend. Lui qui lui ramène plein de récits ensoleillés. Sa peau tannée par le soleil est empreinte de cicatrices que la vie a dégainées pour lui. Il garde un carnet de bord, qui sent le vieux papier mouillé, le café et la poussière. Il rapporte à l’intérieur ses journées, ses sensations et y dessine parfois les paysages avec un crayon de bois qu’il a pu trouver avant de partir. Ce qu’il préfère, c’est monter en haut du mas, il respire l’air marin, il peut contempler l’horizon, nuit et jour. Les jours où ils récupèrent les marchandises embaument le cacao, la chaleur et la sueur. C’est un voyage olfactif si différent de la France. Dans la ville, il sent les fruits grillés et les fruits exotiques. La nature est partout et emplit l’air d’odeurs de fleurs suaves. En rentrant au port, ce sont des agrumes qui saturent l’air. Une fois les marchandises dans les cales, il sent le thé vert et l’odeur animale des animaux qu’ils ont transporté. Il est toujours heureux de revenir au port, en France. D’être accueilli par de grandes rafales de vents qui amènent un air de bonheur dans son pays natal. L’air frais et iodé. Le poisson et le sable humide. C’est le rêve d’un voyage, c’est le rêve d’une vie solitaire et libre. Un parfum de liberté, d’éternité et rempli de morceaux de vie bien
gardés.

 

Pouvez-vous nous décrire votre création :

 

Ma création est partie de l’idée du contraste terre/océan et aussi du contraste entre le France et notamment les ports, qui représentent des endroits froids, cet univers que je connais et le Brésil, terre sur laquelle le Bélem faisait escale pour récupérer des marchandises. Ici c’est mon imaginaire qui est entré en jeu et j’ai imaginé et univers plutôt chaud et boisé. Bélem est un parfum qui raconte la traversée de France jusqu’à Bélem. Mon
parfum est iodé comme le vent frais chargé d’embruns qui souffle dans le port de Nantes. Il rappelle donc le froid, a un côté minéral et très aqueux (accord marin, iodé). Pour rappeler le sentiment qu’on a d’être vivifié après une journée au bord de l’océan il y a des agrumes (citron, mandarine, bergamote). Ensuite Bélem dévoile des facettes plus florales et boisées de fleurs blanches, de santal et de vétiver qui rappellent une terre chaude
avec une profusion de faune : fleurs, fruits, lianes, fèves de cacao. C’est comme ça que je m’imagine cette terre: une terre d’abondance et de richesse. J’ai donc illustré cela par du maté et des épices.

 

Votre astuce parfumeur à communiquer à la clientèle qui souhaite acheter votre parfum :

Bélem est un parfum très frais et ensoleillé qui éveillera la joie de vivre, la sérénité et l’optimisme. N’hésitez pas à l’essayer sur peau car il évolue très différemment : il est à la fois frais et sensuel.

« Inspiration Belem »

Le vieux gréement

Passé les tropiques, le Belem, se laisse aller à une nouvelle torpeur ponctuée çà et là par l’odeur des bois précieux, du sel retenu dans ses grandes voiles blanches…
De sa cale s’exhalent des notes de limette et de citron de Sicile, les baluchons débordent de pétales
et expirent leurs parfums.